1943… En 5e avec Sylvie, Claude, Lydie, Suzanne, Philippe, Charles… Nous prenons, Charles et moi, des cours de diction avec une actrice de la Comédie française en retraite…
Avec quelle passion nous préparons quelques scènes du Cid de Corneille !… Ce n’est pas du « travail scolaire », c’est un enchantement, une joie, un bonheur.
Ces séances avec Elvira, quel charme ! Comme avec Jeanne la poétesse qui me fait apprendre des sonnets de José Maria de Heredia, Apprendre avec Jeanne ou Elvira n’est pas difficile c’est un bonheur, un enchantement, une fête, une provision de trésors !
« Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal
De Palos de Moguer, routiers et capitaines partaient ivres d’un rêve héroïque et brutal… »
Et plus encore Victor Hugo :
« Et Ruth se demandait quel Dieu,
quel moissonneur de l’éternel été
avait, en s’en allant, négligemment jeté
cette faucille d’or dans le champ des étoiles… »
Ça me change des curés de Massillon à Clermont-Fd pour lesquels je ne suis que « abruti », « pauvre âne », « triple crétin »… et autres « douceurs » et délicatesses qui vous « donnent un moral d’acier » et « une confiance inépuisable » dans le monde de la scolarité et des adultes en général…
Chose curieuse, jamais je n’ai associé la religion à ces prêtres. La religion, c’étaient les cheftaines Lassalle, Vimale, Bourguignat…
J’aime retourner dans les strates de mon enfance… Quel patchwork inimaginable d’enfer et de paradis, de désolation et de ferveur, de larmes et de chansons…
Quelle bonne idée a eue mon grand père de dire à sa fille : « Donne-moi ton cinquième pour me tenir compagnie dans la triste solitude de mon veuvage » !