« Cette supplique s’adresse à ceux qui, saisis par le Christ, cherchent à l’être davantage, ceux pour qui, Dieu, loin d’être une idée ou une philosophie, est avant tout Quelqu’un impliquant toute notre vie.
Jésus Christ n’est pas venu pour quelques planches de bois et des clous mais pour révéler à l’homme sa propre grandeur, sa beauté en lui révélant sa sainteté, cet état de don permanent qui est, probablement l’achèvement de l’homme.
Vous avez bien lu “sainteté” et ce n’est ni de l’orgueil ni de l’idéalisme ni de l’utopie d’en parler mais du réalisme. « Soyez parfaits comme votre Père est parfait. »
Le dessein de Dieu sur chacun d’entre nous est justement cette sainteté. Heureusement, on ne naît pas saint on le devient.
Mais l’homme ne peut se faire seul, il est solidaire des autres. L’Église existe ! Et si pour certains l’Église est synonyme de médiocrité, ils pourraient se rappeler que l’Église, pour nous les jeunes du lycée Corot, c’est avant tout l’aumônerie !
La foi ne se vit pas seuls mais en communauté, chacun s’appuyant sur l’autre. L’homme d’action ira se ressourcer chez le mystique, le doux aura besoin de l’énergie du fort et l’énergique aura besoin du doux pour ne pas tomber dans la violence.
La confrontation avec les athées est nécessaire, indispensable, dans un monde où les chrétiens sont aujourd’hui minoritaires. Mais ne risquons-nous pas d’ “aplatir notre christianisme”, de débarrasser notre foi d’éléments essentiels afin d’être au diapason du plus tiède ? Nous ressourcer est indispensable mais il faut aussi évoluer, avancer, se laisser transformer par Dieu. Cela n’est possible qu’en communauté. Et, pour le moment, la communauté chrétienne est plutôt inexistante à l’aumônerie.
Imaginez la douleur d’un homme qui a passé dix années de sa vie à étudier le Projet de Dieu dans la Bible, qui a renoncé à la joie de la paternité pour s’apercevoir qu’on n’a pas besoin de lui !
“Seigneur, rattachez-moi à l’arbre dont je suis. Je n’ai plus de sens si je suis seul. Qu’on appuie sur moi. Que j’appuie sur l’autre. Que tes hiérarchies me contraignent. Je suis ici défait et provisoire. J’ai besoin d’être” (A. de Saint Exupéry, Citadelle).
Prière émouvante du caïd de Saint Exupéry mais qui pourrait être aussi celle d’un petit curé de lycée. Chacun d’entre nous a besoin des autres pour s’accomplir. À dix on résiste mieux au mal, à la médiocrité, à la paresse que seul. C’est pourquoi il est indispensable de créer un noyau chrétien dans notre aumônerie.
On ne reproche pas aux conducteurs de voiture de cesser de rouler pour prendre le temps de faire le plein d’essence. On ne reproche pas à deux amoureux leurs unions qui leur permettent de se rapprocher pour être plus disponibles aux autres.
Qu’on ne reproche pas aux chrétiens de se réunir pour être davantage à l’écoute du Christ et apprendre à Le connaître, ce qui leur permettra sans doute d’être beaucoup plus accueillants et plus engagés.
Alors, on la fait cette communauté chrétienne ? »
(Gilles Rougy, 16 ans, jeune chrétien de l’aumônerie du lycée Corot de Savigny dans les années 70)