Café théologique (3)


Rien de grand ne se fait sans amour

L’amour est ce qu’il existe de plus beau au monde. Nous sommes sur terre en stage d’amour, en stage d’aimer.

J’ai suivi beaucoup de stages, j’ai beaucoup voyagé. Et j’ai vu que le plus grand désir de l’être humain est d’être reconnu, accepté, accueilli dans son originalité suprême. Le manque d’amour fait de lui quelqu’un sans intériorité, tout en surface. J’ai vu ce grand désir, cette soif, et j’ai vu aussi que, dans la Bible, Dieu ne parle que d’amour… Comme c’est curieux !

Photo ©Stan Rougier : L’amour prend plein vol

Nous sommes tous les blessés d’un amour médiocre. Peut-être nos parents ne nous ont-ils pas aimé avec justesse. Partant, nous sommes tous, en quelque sorte, des boiteux. Alors, comme disait Antoine de Saint Exupéry : « Si ton ami boite, ne lui demande pas de danser pour juger sa danse. » Acceptons notre pauvreté, nos maladresses à aimer, tout en sachant que nous sommes sur terre pour progresser. Mais ne nous étonnons pas, par ailleurs, que l’amour des autres ne soit pas parfait ! Dieu, Lui, et Lui seul, nous aime d’un amour fou, sans limite. Demander à un être humain qu’il nous comble d’un amour total relève de la folie. L’homme n’est pas Dieu ! De Dieu, il n’y en a qu’un.

–(P. Xavier de Chalendar) : Jésus résume toute la loi en disant : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Et toi, est-ce que tu t’aimes toi-même ?

–J’ai parfois eu le sentiment que j’aurais dû passer par le cabinet d’un psychanalyste… J’ai bien tenté e le faire par trois fois, mais je me suis toujours trouvé reconduit à la porte au bout du premier échange. On me disait : « Vous vous définissez à l’excès à travers le jugement des autres. Vous allez faire de même avec moi et ruiner ma méthode… »

Dans l’enfance, j’avais une très mauvaise image de moi et, en quelque sorte, un peu honte d’exister. De ce passé qui n’a pas été à la tendresse, j’ai gardé les blessures. J’ai un mal fou à m’aimer, et, trop souvent hélas, beaucoup de mal à aimer les autres. Mais je me soigne ! Je fais des efforts. Je crois en définitive que s’aimer soi-même est la chose la plus difficile à réaliser.

« On m’appelait « Le Toungouse »

Comme disait Bernanos, la grâce des grâces serait de « s’aimer humblement soi-même, comme n’importe lequel des membres souffrants de Jésus Christ » (Journal d’un curé de campagne).

–Vous avez dressé un catalogue à destination des fiancés… absolument inaccessible ! Comment faire ?

–J’ai omis tout à l’heure de vous lire la dernière phrase : « Comme je sais que je n’arriverai jamais à atteindre cette étoile, je m’engage à te demander pardon humblement à chaque fois. »

Photo ©Stan Rougier

La beauté de l’amour est de savoir dire : « Avançons ! Les tempêtes, ça met de l’ambiance ! Je ne t’ai pas épousé pour vivre dans un 5 étoiles, je savais que cela allait être difficile. »

Une jeune femme écrivait à son fiancé ces lignes que je trouve magnifiques : « Je sais que notre union sera remplie de coups et de blessures, mais je sais que si je ne t’épouse pas, je serais trop malheureuse. »

L’amour apparaît toujours cette victoire gagnée pied à pied sur l’indifférence, sur l’oubli, comme les polders et les digues, en Hollande, se gagnent sur la mer.

Pour que l’amour grandisse en force et en durée, il faut accepter de faire le deuil de ses désirs irréalistes de fusion, d’absence de conflit, etc.

Photo ©Stan Rougier

–Vos propos m’ont semblé complètement réducteurs. Votre regard sur l’amour est demeuré au ras des pâquerettes. Je suis choquée : il y a des amours formidables, des amours qui font grandir !

–Je n’ai jamais dit le contraire ! À l’inverse, on ne manque jamais de m’accuser d’être un idéaliste…

Dieu est Amour. Avant le Big-Bang, l’amour existait. L’univers est né d’un débordement de la joie divine, de cet amour perpétuellement échangé entre les trois personnes de la Trinité. L’Amour était parfait. Il l’est toujours. Il a donné naissance à des êtres en stage d’amour.

Photo ©B. Guibert

Je crois fondamentalement qu’un être humain ne peut vivre que s’il est aimé. J’ai vu des êtres magnifiquement épanouis parce qu’ils étaient aimés. L’amour fait exister sur tous les plans. Rien n’est plus grand que l’amour, et rien de grand ne se fait sans amour.

Mais l’amour est aussi quelque chose de menacé, de difficile, d’exigeant –et je m’en réjouis.

Le péché existe. J’ai visité des prisons. J’y ai rencontré des pédophiles. Je ne peux pas après cela m’exclamer : « Tout le monde il est beau ! »

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