Un jeune homme d’Assise libre et vivant



Une clarisse de mes amies témoigne :

C’était fin 1973, j’avais 25 ans. J’avais depuis longtemps abandonné la pratique religieuse de mon enfance et ne me préoccupais apparemment plus ni de Dieu ni de ses saints. Je vivais comme la majorité des filles de mon âge, ni plus ni moins, ni meilleure ni pire.
Et, comme beaucoup, j’aspirais… à quoi ? à l’amour, à la vérité, à la liberté ? et je traînais ma soif de vivre dans les rues de Paris, lorsque le « métro-boulot-dodo » m’en donnait le loisir.

Un refuge, une fuite : le cinéma. Ce soir-là, j’allai voir un film que je ne connaissais pas. Uniquement parce que le titre « François ou le chemin du soleil » du film de Zeffirelli, m’avait plu.

Heureusement j’y étais allée seule, je pleurais d’un bout à l’autre : moi, rivée à mon siège, j’étais une morte vivante, et ce personnage-là sur l’écran était libre et vivant à en crever la scène.
Rentrée chez moi, je consultai le dictionnaire pour voir qui était ce François d’Assise. Le lendemain et les soirs suivants, je retournai voir le film, et je continuais à pleurer. Ses phrases m’habitaient, me poursuivaient : « Viens, laisse-toi construire » ; « Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est né de l’Esprit est Esprit » ; « Words, words, there was a time when I believed in words » (le film était en anglais et les phrases me sont restées gravées en anglais).

Au cœur de notre monde fatigué, un homme avait ravivé en moi le goût de vivre et d’être libre et était prêt à m’en montrer le chemin. Il me fallut une bonne année pour le suivre jusqu’au Christ, et encore deux pour qu’il me conduise « au jardin de sœur Claire »…

Pour moi, le film n’avait pas trahi François, car il est bien avant tout un homme libre et vivant, un homme que l’amour vivant de son Seigneur a libéré et a propulsé en avant avec une telle force que plus jamais – jusqu’au jour de sa mort – il ne pourra s’arrêter. Il est l’homme du « toujours plus loin – toujours plus haut » parce que la vie est dynamisme, que tout est à nous, mais nous sommes au Christ et le Christ est à Dieu.


[…] François n’est pas l’homme d’une époque – même si, c’est vrai, il a totalement épousé la sienne et en a fait éclater les structures sociales – mais un homme éternel, car qui croit en la vie ne meurt pas. Et c’est pourquoi il peut aujourd’hui encore donner le goût de la vraie vie et de la vraie liberté, à qui écoutera battre son cœur.

Nous avons tous un lépreux à embrasser, nous avons tous notre indésirable : un travail qui nous coûte, un frère ou une sœur que nous n’arrivons pas à aimer, une
situation que nous n’arrivons pas à assumer… et peut-être sommes-nous notre propre lépreux. Le jour où nous arriverons à l’aimer ce lépreux-là,

le jour où, comme François, nous arriverons à l’embrasser ce lépreux-là, nous serons comme lui libérés et donc disponibles pour suivre le Seigneur.

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